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Inflation et déflation : De Charybde en Scylla !!

Publié par Musa sur 19 Octobre 2014, 14:11pm

Inflation et déflation : De Charybde en Scylla !!

Se faire du mauvais sang à cause du dilemme inflation-déflation fût, pour très longtemps, l’apanage des as de la matière, entre autre les économistes et  les gouverneurs des banques centrales. Aujourd’hui, ce dilemme  semble également marteler  le cerveau de la foule  au point d’inspirer les chanteurs de la country music !!

Inflation et déflation : Quèsaco ?!!

                 

 Avant d’entrer dans le vif du sujet, une petite prise de connaissance avec les termes  inflation,            déflation et le reste de la famille  (hyperinflation, désinflation et stagflation) s’impose.

 

L’inflation correspond à une situation de hausse générale et durable des niveaux des prix des biens et des services. Générale, parce que cette hausse n’est pas limitée à certains biens et/ou services. De même, on  ne peut pas parler d’inflation si la hausse des prix de certains produits (pétrole par exemple) est plus ou moins compensée par la baisse du niveau des prix de d’autres produits (Produits électroniques sous l’effet du progrès technique). Et durable car elle ne correspond pas à un choc momentané. Au contraire, il s’agit d’un processus qui a tendance à s’auto entretenir voire même s’accélérer.

 

A l’opposé, la déflation correspond à un processus général et permanent de baisse des prix.  La déflation est à distinguer des reculs momentanés des niveaux des prix (Période des soldes par exemple). De même, on ne peut parler de déflation si la baisse des prix concerne uniquement certains produits sous l’effet du progrès technique par exemple.

 

La désinflation  évoque une situation de baisse du taux d’inflation. Exemple : Passer d’un taux d’inflation de 2 % à un taux de 1 %. Par contre, passer de 2 % à  un taux négatif tel que -1 %, pour une longue durée, illustre le phénomène de déflation sus mentionné.

 

Amalgame des deux termes « stagnation » et « inflation », la stagflation  renvoie à une situation économique alliant, à la fois, une croissance économique faible voire nulle et une croissance élevée des prix. Le monde a eu l’occasion d’expérimenter cette situation  durant les années 70 sous l’effet du choc pétrolier. En effet, le renchérissement des prix du pétrole a conduit à l’accélération du taux d’inflation tout en paralysant la croissance dans les pays industrialisés.

 

Est considérée comme hyperinflation, une inflation avec un rythme de croissance des prix extrêmement rapide. Certains qualifient même d’hyperinflation toute inflation dont le taux tend à se maintenir ou dépasser le niveau de 50% mensuellement. Mais cette définition reste au regard de d’autres assez simpliste.

Le danger de l’hyperinflation réside dans 2 faits : le premier est lié au cercle vicieux qu’elle génère, un cercle alimenté par les anticipations des consommateurs.  En effet, de part la montée extrêmement rapide des prix, les consommateurs anticipent de futures augmentations sur le court terme et cherchent à hâter leurs achats. Face à ce comportement, les producteurs, eux, chercheront à stocker les biens pour en attirer de meilleures marges plus tard. L’offre s’affaiblissant ainsi par rapport à la demande et poussant vers une nouvelle montée des prix.

Le second réside dans le fait que l’hyperinflation peut endommager sérieusement  la santé d’une économie, en empêchant la monnaie de jouer son rôle traditionnel de moyen d’échange et de réserve de valeur. En effet, l’hyperinflation anéantit la valeur de l’argent : ce qu’une somme d’argent apporte aujourd’hui en terme de pouvoir d’achat, demain elle en apportera beaucoup moins. La conséquence directe en est que les gens perdent confiance en leur monnaie nationale et cherchent des moyens de substitution.

 

Inflation vs Déflation : Où réside le « VRAI » danger … ?!!

 

Encore hantées par les souvenirs de l’Allemagne de Weimer, les banques centrales se fixent, presque inlassablement, pour objectif prioritaire la lutte contre l’inflation. Certains vont même jusqu’à qualifier cette hantise de  l’inflation de crainte excessive, car un certain taux d’inflation reste un must pour stimuler la croissance économique et par conséquent, les politiques mises en place par les banques centrales pour la contrecarrer peuvent limiter sérieusement cette croissance. 

« Under normal circumstances, the American economy actually depends on a slight degree of inflation to keep running smoothly. Inflation is the bacteria of the financial world: It carries a certain ick factor and can cause a lot of trouble if allowed to grow unchecked, but a carefully calibrated amount is essential to keep the bigger, loftier parts of the system functioning properly. » Martha C. WHITE _ The BIG MONEY .

C’est ainsi que, de nos jours, un taux d’inflation de 1% à 3% peut être toléré. Cependant, Si ce taux croît de manière incontrôlée, il peut nuire à une variété d’industries particulièrement les prêteurs. En effet, à taux d’intérêt fixe (c.à.d. non indexé sur l’indice des prix), l’inflation profite aux débiteurs au détriment des créanciers en dégradant le taux d’intérêt réel défini comme la différence entre le taux d’intérêt nominal et le taux d’inflation. 

 

Exemple : Vous héritez d’une somme de 10.000 €, qui tombe d’ailleurs à pic puisque vous songiez à vous débarrasser de votre tas de ferraille et vous acheter une nouvelle voiture qui coûte justement 10.000 € (Humm…quel hasard en effet ?!!)  


Avec votre héritage, vous pouvez ainsi vous acheter cette voiture tant attendue … ou, n’étant pas très pressé(e) (après tout votre tat de ferraille pourra encore tenir pendant quelque temps !), vous décidez de reporter votre achat jusqu’à l’année prochaine et entre temps placer la somme de 10.000€ à 7% par an et dégager un surplus de 700 € en estimant que cela  vaut la peine d’attendre encore 12 mois.

Trois scénarios peuvent se présenter : 1. Taux d’inflation <taux d’intérêt (Augmentation des prix de 3%) ; 2. Taux d’inflation =taux d’intérêt; 3. Taux d’inflation >taux d’intérêt (Augmentation des prix de 12%)

 1. L’année prochaine, le prix de la voiture sera de 10.000 € * 1,03 = 10.300€ soit un surplus de 300€ (10.700-10.300), moins que ce vous espériez encaisser ;

2. Le prix de la voiture est passé à 10.000€*1,07 = 10.700€. Plutôt déçu puisque votre gain est nul 0€ (10.700-10.700) ;

3. Le prix de la voiture est passé à 10.000€*1,12=11.200€ et cette fois-ci, vous devez trouver quelqu’un pour vous prêter la différence 11.700-11.200= 500€ pour acheter votre voiture. Il y a effectivement de quoi rager !!
 

D’où donc la notion de taux réel. Ce qui importe n’est pas ce que vous gagner en placement (taux  nominal), mais la différence entre le taux de placement et celui mesurant la hausse des prix à savoir le taux d’inflation : Taux réel = taux nominal – taux d’inflation. On arrive ainsi à la conclusion que plus le taux d’inflation est important, moins on a intérêt à placer et encore moins à épargner. L’investissement, principal moteur de l’économie,  s’en retrouve paralysé. En outre, l’inflation dégrade le solde de la balance commerciale puisqu’elle entrave les exportations au profit des importations. A l’inverse, elle profite aux débiteurs et participe à l’allégement du coût réel de leur endettement.

 

Et la déflation alors …la baisse des prix n’est elle pas une bonne chose ?!!

“Well, yes and yes, but no” répond Martha C. WHITE _ The BIG MONEY

La baisse des prix est une bonne chose lorsqu’elle est synonyme d’amélioration du pouvoir d’achat. C’est le cas notamment lorsqu’elle est issue d’une amélioration dans la productivité ou est la résultante de la concurrence dans un marché.

Quand la déflation est la cause,  ça n’est guère une bonne chose mais signifie plutôt que maintenant  vous êtes moins payé et vos biens fonciers valent moins que quelques années avant. La seule chose qui ne perd pas de sa valeur est votre dette, rappelle Martha C. WHITE. D’où la difficulté : toutes vos dettes qu’il s’agisse d’emprunts pour logement, crédits pour étudiants avant la déflation ne changent pas, sauf que maintenant vous avez moins d’argent pour vous en acquitter.

Le danger de la déflation provient de ce que beaucoup appellent « les Attentes Déflationnistes ». En voici une illustration : 

Ainsi, s’attendant à des baisses de prix, les consommateurs sont incités à reporter leurs achats : la même somme d’argent permettra d’acheter d’avantages de biens dans le futur par rapport à un achat dans l’immédiat. Les producteurs font de même puisque eux aussi anticipent une baisse des cours des matières premières et autres composants de la production. La conséquence directe en est que la demande agrégée adressée aux entreprises baisse, obligeant ces dernières à s’adapter en baissant leur production et en faisant la chasse aux coûts. La première victime de cette chasse étant bien évidemment l’offre de l’emploi. D’où, augmentation du taux de chômage, baisse des revenus distribués et par conséquent baisse de la demande participant ainsi à entretenir un véritable cercle vicieux.

Et on n’est loin d’être sorti de l’auberge puisque au moment où les revenus entament leur descente en douceur, la dette, elle, renforce son poids et pèse de plus en plus lourdement sur les emprunteurs (ménages, entreprises et Etats). En effet, selon l’économiste américain Irving Fisher,  la déflation  augmente le coût réel d’endettement souvent non indexé sur l’évolution des prix dégradant ainsi la situation des emprunteurs. En d’autres termes, les dettes demeurent certes inchangées, mais dans un contexte déflationniste elles représentent davantage de pouvoir d’achat.

L’investissement devient moins attrayant pour ne pas dire inutile devant une demande à tendance baissière et des charges fixes toujours aussi importantes aggravées par le poids des charges financières. Devant la dégradation de la situation économique des ménages et des entreprises, les banques resserrent leurs conditions d’octroi de crédit conduisant ainsi à un « Credit Crunch ».

 

Déflation & Deleveraging : Existe t-il une quelconque relation ?!!

 

La réponse à cette question se résume en trois mots : La Déflation Par la Dette. Un concept avancé par l’économiste américain Irvin Fisher durant les années 30 selon lequel la déflation serait la résultante d’un phénomène de désendettement : ‘’ Deleveraging ‘’. Le processus se résume ainsi :

  1. Surendettés, les acteurs économiques cherchent à brader leurs actifs pour rembourser leurs dettes ;
  2.  Limitant ainsi les dépôts bancaires et contractant la vitesse de circulation monétaire ;
  3. Conduisant par la suite à une chute généralisée des prix accompagnée d’une augmentation de la valeur des unités monétaires en question ($, €, MAD, …) ;
  4. Devant les ventes massives d’actifs (Ventes d’actions sur la bourse par exemple), chute des valeurs des entreprises entraînant certaines à déclarer faillite ;
  5. Dégringolade des profits sous l’effet du recul de la consommation ;
  6. Recul de la production en réaction au recul de la demande et augmentation du taux de chômage ;
  7. Crise de confiance s’en suit et pessimisme lié aux faillites et à la situation détériorée  de l’emploi ;
  8. Les agents économiques préfèrent thésauriser gonflant ainsi le niveau d’épargne et contractant d’avantage la masse monétaire en circulation ;
  9. Baisse des taux nominaux au profit d’une augmentation des taux réels. 

 

Oui, mais pourquoi  craigne t- on la déflation plus que l’inflation. Après tout, toutes les deux sont aussi dangereuses l’une que l’autre ?!!

 

L’inflation peut être une bonne chose, la déflation ne peut être qu’une très vilaine chose !! On en a déjà parlé, un taux d’inflation bien maîtrisé est un must pour la croissance économique. Quand ce taux commence à échapper au contrôle, les banques centrales dispose d’un large éventail de politiques d’action pour le ramener aux niveaux souhaitables. Par exemple, elles peuvent agir par le biais d’une politique monétaire en augmentant directement les taux d’intérêt ou indirectement en encadrant l’octroi des crédits, ou encore agir par le biais des politiques budgétaires en essayant de restreindre la demande par le biais de l’augmentation des impôts et/ ou la baisse des dépenses publiques.

Ce large éventail d’actions dont disposent les banques centrales pour lutter contre l’inflation explique justement la hantise que ces dernières ont envers la déflation, car l’ensemble de ces politiques déclarent forfait quand la déflation débarque. D’ailleurs l’exemple du Japon en témoigne, il en a souffert pendant 10 longues années et on ne peut pas prétendre aujourd’hui qu’il s’en est remis à 100%!!

 

Le danger de la déflation, rappelant le, réside dans ce qu’on appelle les attentes déflationnistes.  

 

« Les attentes déflationnistes ont des effets dévastateurs pour la conjoncture économique. Lorsque les attentes vont dans le sens d’une inflation, les biens durables acquièrent un statut de valeur refuge, ce qui peut constituer un motif d’achat. Celui qui renonce à consommer aujourd’hui pour pouvoir mieux consommer demain, n’a plus besoin d’investir, mais doit simplement thésauriser. Il en résulte une certaine retenue du côté des consommateurs. Les investissements sont moins attrayants, parce que les prix des biens dont la vente devrait servir à financer les investissements évoluent à la baisse sur le long terme. En bref, la valeur actualisée des investissements diminue.
En règle générale, les attentes déflationnistes ne peuvent pas être compensées par des taux d’intérêts bas, voire négatifs : en effet, aucun créancier n’est enclin à prêter de l’argent à un taux qui ne couvre ni la prime de risque, ni les frais.» SECO (Staatssekretariat für Wirtschaft) Rapport spécial sur la déflation-Automne 2002.

En d’autres termes, les efforts déployés pour booster la demande à travers la baisse des taux d’intérêt nominaux n’aboutiront pas et conduiront même à une situation dite de « liquidity trap ». Situation caractérisant un pays qui baisse son taux d’intérêt nominal au point d’approcher ou égaler le niveau 0 pour éviter une récession. Mais l’ennui est que la liquidité créée par ces taux d’intérêt bas ne stimule pas l’économie au point d’atteindre le plein emploi. Dans une telle situation, toute injection supplémentaire de monnaie ne saurait baisser d’avantage le taux d’intérêt nominal qui ne peut pas descendre en deçà de 0 et ne saurait donc stimuler la demande.  Ce qui a pour conséquence d’empirer la récession.

Devant l’échec de la politique monétaire, reste la politique budgétaire. Or la lutte contre la déflation nécessite des moyens financiers colossaux qui finissent par empirer le déficit budgétaire publique et augmenter l’endettement étatique (le cas présent des USA en témoigne : déficit de 1300 Milliards de $). Et toute tentative d’y remédier par le biais d’une augmentation des recettes fiscales découragerait davantage la demande.

 

Conclusion …

 

La déflation c’est dangereux et l’inflation ce n’est pas bon non plus. Tout l’art et toute la difficulté consistent donc à trouver le juste équilibre entre les deux !!

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